LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"L'ampleur du saccage" - Kaoutar Harchi

Pourquoi faire compliqué quand...

C'est un récit qui vous cueille à froid, vous immergeant aussitôt dans une narration d'où suintent détresse et souffrance...

Arezki, toxicomane désœuvré, délaissé, passe ses journées au lit, ressassant ses angoisses et ses obsessions, essentiellement nourries par le secret qui plane sur son ascendance, dont il ignore tout. Ses errements psychiques sont ponctués par la crainte autant que par l'espoir des visites de Si Larbi, sorte de père de substitution que son métier de chauffeur routier rend souvent absent. Une nuit d'égarement, attiré par les lumières d'une fête de mariage, Arezki commet l’irréparable, et se retrouve en prison. C'est là qu'il rencontre Riddah, directeur de l'établissement qui, ayant reconnu dans ce jeune prostré et terrifié on ne sait quelle manifestation de son passé, décide de l'aider... A ce trio va s'ajouter Ryeb, gardien de prison lui aussi aux prises avec des démons ancrés dans le mystère de ses origines.

Ces quatre personnages font alternativement entendre leurs voix, au fil de l'entrecroisement de leurs destins douloureux que constitue "L'ampleur du saccage".

Roman polyphonique, donc, mais aussi roman mosaïque, dont les différents éléments s’emboîtent peu à peu, avec à mon avis un peu trop de facilité. J'y ai trouvé trop de coïncidences, voire d'invraisemblances, et de raccourcis qui nuisent à la crédibilité du récit. C'est bien dommage, car l'écriture de Kaoutar Harchi m'a par ailleurs séduite : j'ai aimé ses longues phrases travaillées où chaque mot, rendu indispensable, est à sa place, et la profusion de verbes qui confère au récit cette lancinance brutale, en adéquation avec son propos. L'auteure dépeint une société machiste, dans laquelle les frustrations sexuelles engendrées par la rigueur religieuse et morale génèrent hypocrisie et violence, produisent des individus qui ignorent l'amour, la tendresse, le respect de l'autre. Et d'exprimer cette réalité glauque et barbare par l'intermédiaire de voix uniquement masculines est sans doute une des forces de ce roman, ainsi nourri de de la complexité et des contradictions qui torturent ses héros. Ces derniers sont dépassés par leurs pulsions, et cohabitent difficilement avec l'image d'eux-mêmes que leurs renvoient le souvenirs d'actes qu'ils ont commis sous leur emprise. 

Il sourd de "L'ampleur du saccage" un désespoir profond, un sentiment de malheur inéluctable. Et Kaoutar Harchi n'avait nullement besoin, à mon sens, de doter son intrigue de tant de rebondissements pour le rendre fort et marquant, son écriture y aurait suffi. J'ai personnellement été gênée par ces invraisemblances évoquées plus haut, qui m'ont empêché de savourer pleinement ma lecture.

>> L'avis, plus enthousiaste, de Jérôme.

Commentaires

  1. Je reconnais qu'il y a des facilités dans la narration, mais la force de l'écriture a pris le dessus en ce qui me concerne.

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    1. Je peux le comprendre, elle est en effet très marquante.

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